Des cadeaux mal emballés

Non, non, ne vous inquiétez pas, je ne suis pas en train d’écrire un article en retard sur les cadeaux de Noël et vous remémorer le stress des factures que vous avez maintenant à payer.

C’est du sens de la vie quand on souffre que je veux vous entretenir. S’il y a bien une chose que l’on ne souhaite pas dans notre vie, c’est la souffrance, les épreuves, les blessures. Pourtant, elles se pointent le bout du nez, un peu trop souvent, même si l’on ne les a pas invitées. Il semble que l’existence humaine est, à la fois, inexorablement lumière et ombre. La lumière, le bonheur, l’amour on n’a pas de problème avec ça. On les appelle. On les attire. On en veut toujours plus. Ça goûte bon et ça nous humanise. Humanise, dans le sens que cela fait de nous de meilleures personnes. Mais, comme la vie est un forfait tout inclus, l’autre volet, plus lourd et plus sombre, frappe aussi à notre porte.

Que faire devant la souffrance ? Comment essayer de lui donner un sens ? De moins résister, moins nier, moins fuir et devenir victime devant cette invitée indésirable, mais de chercher plutôt à l’accueillir comme une occasion précieuse pour grandir et évoluer. Je le reconnais, c’est bien plus facile à dire qu’à faire. On connaît tous la petite phrase cliché : Il n’y a rien pour rien. Mais l’appliquer, l’intégrer dans toutes les dimensions de notre être ( notre tête, notre corps, nos émotions, notre âme ) c’est toute une autre histoire.

Ce qui pose problème avec la souffrance, c’est justement qu’elle est souffrante. Qu’elle fait mal. Qu’elle nous heurte profondément dans notre humanité. En fait, la souffrance dans un premier regard, n’a pas de sens. Elle est une ennemie. Une voleuse de notre bonheur et de notre quiétude. Ça n’a pas de sens quand des parents perdent un enfant. Ça n’a pas de sens le diagnostic d’une maladie incurable, d’un cancer, d’un accident d’auto tragique, d’une perte d’emploi et pas plus de sens une catastrophe naturelle qui tue des centaines, parfois des milliers de personnes. Et ce non-sens à nos épreuves ajoute encore plus de souffrance, car comme être humain, nous avons fondamentalement besoin d’être en maîtrise de nos vies, de comprendre et de donner du sens à ce qui nous arrive.

Alors, que faut-il faire pour donner du sens à la souffrance ? Je serais portée à vous dire dans un premier temps de ne rien faire. Ne pas résister. Lâcher prise. Accueillir. Accepter cette souffrance et la ressentir dans toute son intensité, sa douleur et son absurdité. Même si je me bats contre ma souffrance, elle est là, elle a déjà pris sa place dans mon être, dans mes cellules. Je suis consciente que ma proposition de « faire avec » ne suscite probablement pas un enthousiasme délirant. Ce n’est pas comme apprendre que l’on vient de gagner à la loterie. Cela demande du courage et de la volonté d’accepter d’entrer dans ce qui nous fait mal et de vivre toutes les émotions qui viennent avec. Car, faut-il le reconnaître, la souffrance nous met face à face avec notre existence, avec le sens de notre présence sur la terre. Elle nous met en face de notre propre solitude. Cette solitude d’exister pour soi et par soi. Voilà, peut-être le premier cadeau mal emballé que la souffrance nous offre : un rendez-vous avec Soi. Avec l’essence de son ÊTRE. Un rendez-vous avec SA VIE !

Au cœur des épreuves que je rencontre sur ma route de vie, il y a moi. Je suis là au centre de mon existence. J’EXISTE ! C’est peut-être ce lien, avec ce qu’il y a de plus beau et de plus grand en moi, que nos souffrances nous amènent à contacter. À renouer le contact sacré avec son essence. Son essence lumineuse … et divine.

Bien sûr, quand on souffre et qu’on est au cœur du tumulte intérieur, c’est précisément cela qu’on a perdu de vue, notre lumière intérieure. L’espoir de jours meilleurs. Mais je crois que si l’on reste suffisamment longtemps avec sa souffrance pour l’accueillir et la porter avec une énergie de bienveillance face à soi-même, tout doucement elle va nous révéler ses mystères … et de nouveaux chemins de vie. Un certain sens va émerger et nous donner un souffle nouveau. Cela peut parfois prendre du temps, beaucoup de temps, selon la gravité de ce qui nous a fait souffrir. Suffisamment de temps pour qu’après l’état de choc, on puisse poser un second regard. Un regard plus intérieur, plus intime. Un regard plus spirituel. Un nouveau regard qui nous permet enfin de voir les choses sous un tout autre angle. Un nouvel angle qui aurait été impossible d’envisager au cœur de la tempête. Il nous faut parfois du recul, beaucoup de recul pour pressentir que nos épreuves ont des bénédictions à nous apporter. Qu’elles sont des occasions exceptionnelles pour se transformer et évoluer. Cela demande un grand travail de patience et d’amour. C’est tout un processus de cheminement que d’arriver à bénir ce qu’un jour on a maudit. Pour arriver à ce passage délicat et profond, il faut accepter de traverser nos épreuves avec vérité … et confiance. Continuer d’avancer, même quand on ne voit pas clair, avec l’intime certitude que la vie va renaître et que nous sommes portés par plus grand que nous. Que notre âme elle, sait que ce qui nous arrive est parfait !

Oui, la vie nous réserve parfois des cadeaux dont on aurait bien voulu se débarrasser tellement ils sont mal emballés, mais ils n’en demeurent pas moins des cadeaux. Des cadeaux qui nous ont parfois meurtris … mais transformés jusque dans les profondeurs de notre être parce que nous avons accepté de soutenir l’insoutenable pour que la magie de la vie s’opère à nouveau.

Linda Léveillée