Offrir la bienveillance en cadeau

La période des fêtes est certainement un des temps privilégiés dans l’année où nos cœurs vibrent au don, où nos mains s’ouvrent à la générosité face à l’autre, que cet autre soit un proche ou un inconnu. En cette période de surabondance, nous ressentons l’élan d’en faire déborder un peu sur les gens autour de nous. Et tant mieux qu’il en soit ainsi, cela nous permet de garder vivante notre humanité et notre solidarité face à l’être humain.
Par contre, question de faire un petit pas de plus dans ce beau mouvement d’ouverture, je vous propose une version alternative, et plus spirituelle, à cette générosité de cadeaux et de dons matériels.

Voici d’abord une histoire inspirante qui va vous conduire vers une autre vision.

Quelqu’un vient un jour trouver un grand philosophe et lui dit :

Sais-tu ce que je viens d’apprendre sur ton ami ?
Un instant répond le philosophe. Avant que tu me racontes, j’aimerais te faire passer un test, celui des 3 passoires.

Les 3 passoires ?
Mais oui, reprit le philosophe. Avant de me raconter toutes sortes de choses sur les autres, il est bon de prendre le temps de filtrer ce que l’on aimerait dire.

C’est ce que j’appelle le test des 3 passoires.

LA PREMIÈRE PASSOIRE EST CELLE DE LA VÉRITÉ.
As-tu vérifié si ce que tu me dis est vrai ?
Non. J’en ai simplement entendu parler …
Très bien. Tu ne sais donc pas si c’est la vérité.
Essayons de filtrer autrement en utilisant une deuxième passoire.

LA DEUXIÈME PASSOIRE EST CELLE DE LA BONTÉ.
Ce que tu veux m’apprendre sur mon ami, est-ce que c’est quelque chose de bon ?
Ah non ! Au contraire.
Donc, continua le philosophe, tu veux me raconter des choses méchantes sur mon ami et tu n’es même pas certain si elles sont vraies.
Voyons si tu vas réussir le test, car il reste une dernière passoire.

LA TROISIÈME PASSOIRE EST CELLE DE L’UTILITÉ.
Est-il utile que tu m’apprennes ce que mon ami aurait fait ?
Non. Pas vraiment.
Alors, conclut le philosophe, si ce que tu as à me raconter n’est ni vrai, ni bien, ni utile, pourquoi vouloir me le dire quand même ?

Je me souviens que la première fois que j’ai lu cette histoire, j’ai été séduite. Séduite par sa simplicité, mais aussi par son caractère radical, presque lapidaire. Le message est très clair. Si ce que tu as à dire sur les autres ne vient pas de ton cœur et n’est pas empreint d’une grande bonté, ferme là. Ici, le silence est un acte d’amour. Tout comme le proverbe selon lequel il faut tourner sa langue 7 fois dans sa bouche avant de parler. Cette rotation linguale est aussi un préliminaire à l’amour.
L’intention de cette nécessaire introspection est de prendre conscience du poids de nos paroles. Celles-ci peuvent être autant nourrissantes que dévalorisantes, constructives que destructrices. Porteuses de vie ou génératrices de mort. Je sais que j’y vais fort lorsque j’ose dire que nos paroles peuvent amener la mort, mais il en va ainsi de tous nos jugements, ceux qui sont exprimés ouvertement et même ceux qui restent dans le non-dit, car ils se ressentent tout autant et font aussi mal. Le regard assassine autant que les mots.
Il faut travailler très fort sur soi-même pour résister à cette tentation, oh combien tentante, de critiquer et d’étiqueter l’autre qui est différent de nous, de le juger parce qu’il ne pense pas et n’agit pas comme nous. Faut-il bien se le redire, en général, on juge les autres en proportion de comment on se juge soi-même. Dit autrement, plus notre regard sur nous-mêmes devient bienveillant et tendre, plus nous sommes capables d’offrir aux personnes qui nous entourent ce même regard de douceur et de bonté. C’est là, me semble-t-il, une de nos plus grandes raisons d’exister comme êtres humains : devenir des êtres plus aimants, empreints d’une grande compassion face à nous-mêmes et à tous nos semblables.

Comment diminuer considérablement et, ultimement, mettre fin à cette tentation malsaine (tant pour soi que pour les autres) qui nous amène trop souvent à critiquer et juger ? Un moyen aidant pour y parvenir, c’est de prendre le temps de se mettre dans la peau de l’autre. Quand on fait cet effort, cela nous permet de mieux voir et de mieux comprendre le point de vue de l’autre, ce qui a pour avantage de faire fondre nos préjugés comme de la glace au soleil. Un autre truc est d’appliquer la maxime populaire qui dit de ne pas faire aux autres ce que l’on ne voudrait pas qu’on nous fasse. Car, il ne faut surtout pas perdre de vue que le besoin le plus fondamental de l’être humain c’est d’être vu entendu, reconnu, apprécié et aimé. On carbure à l’affectif ! On se nourrit de reconnaissance. Satisfaire ce besoin viscéral est bon tant pour soi-même que pour les autres. C’est ce que l’Évangile nous rappelle d’une façon très simple : Ne juge pas et tu ne seras pas jugé. Ce n’est pas d’hier que l’être humain est appelé à une élévation de son ÊTRE qui le propulse vers le haut et non pas vers le bas. Vers l’amour et non pas vers la condamnation. Vers l’union et non pas vers la séparation.
Et si, en cette période des fêtes, j’offrais en cadeau ma bonté de cœur et mon regard de bienveillance sur les gens qui m’entourent ? Et si je choisissais, avec conscience, que les mots qui sortent de ma bouche soient empreints de tendresse et d’un grand souci de prendre soin des autres ? C’est peut-être cela la Bonne Nouvelle qui nous a été annoncée et qui continue encore d’être vivante aujourd’hui : OFFRIR EN CADEAU LA BIENVEILLANCE !

Linda Léveillée