VÉRITÉ ET MENSONGE

Question quiz pour entrer dans le vif du sujet. Est-ce que l’adage qui prétend que toute vérité n’est pas bonne à dire est selon vous, VRAI ou FAUX ?

Peu importe votre réponse, on est loin d’être dans un sujet neutre quand on parle de vérité et de mensonge. On a tous nos propres expériences et notre opinion sur ce sujet. Pour ma part, j’ai eu droit à un traumatisme à l’automne dernier lors d’une formation en synergologie (science qui étudie la signification des mouvements du corps), en apprenant l’ampleur du phénomène du mensonge dans nos sociétés occidentales. Voici, entre autres, ce que j’ai appris qui m’a fortement remuée. Même si théoriquement nous le dénonçons, nous avons une grande facilité à tolérer et même à nous complaire avec le mensonge. Il y a des avantages à croire à certains mensonges. La vérité est parfois trop dérangeante pour qu’on ait envie de l’entendre. Nous mentons en moyenne 18 fois à l’heure. Nous nous faisons mentir entre 10 et 200 fois par jour. Les hommes mentent huit fois plus que les femmes lorsqu’ils parlent d’eux-mêmes. Les femmes pour leur part mentent davantage pour protéger leurs proches. Les couples non mariés se mentent trois fois plus que les couples mariés. Ma légendaire naïveté a été mise à rude épreuve. Moi qui depuis mon enfance avais fait de l’authenticité ma valeur charnière, j’ai été sidérée de prendre la mesure de l’omniprésence du mensonge et par le fait même de notre complaisance à le tolérer, voir même d’en être parfois complice.

Je vais donc essayer de réfléchir avec vous sur pourquoi on ment autant et quels sont nos défis pour devenir plus vrais. Malheureusement, on doit reconnaître que notre société de consommation, basée sur l’image et le paraître nous conduit à nous accommoder facilement du mensonge. Notre hyper consommation nous fait baigner dans l’univers du faire semblant et de l’artificiel. D’ailleurs, la publicité qui nous fait croire qu’il faut posséder toujours davantage pour être plus heureux est par définition totalement mensongère. Elle nous maintient dans l’illusion et le déni. Elle réussit même à nous faire nous inventer des besoins. On fait semblant qu’on est heureux, pour faire comme les autres, pour plaire et se conformer aux standards sociaux, mais surtout pour nourrir notre égo qui a une soif insatiable de paraître et de reconnaissance.

Il y a dérive quand pour rassurer notre besoin de sécurité, les compagnies d’assurances, qui font des milliards de profits, nous convainquent que l’on doit absolument être assuré mur à mur. Il y a dérive quand on nous convainc que notre réussite sociale se mesure à la valeur de notre auto et de notre maison. Il y a dérive quand les produits de beauté sont essentiellement destinés à cacher, à camoufler, à mentir. Il y a dérive quand la publicité nous affirme que le Nutella est un excellent choix alimentaire pour les enfants au déjeuner.

Si notre société de consommation nous conduit irrémédiablement au mensonge, il faut bien reconnaître que l’être humain mentait bien avant l’arrivée des WalMart. Quelles sont les raisons qui nous incitent à mentir aux autres ? Fondamentalement, on ment pour se protéger. Pour protéger notre image qu’on veut maintenir belle et positive auprès de notre entourage. Le mensonge nous sert de cachette pour ne pas révéler des aspects de nous que l’on a occultés, car selon nous, les révéler pourrait nous faire perdre la face … et notre place. Au fond, c’est la peur d’être rejeté et de ne pas être aimé qui nous fait, la plupart du temps inconsciemment, agir avec inauthenticité. Cette peur de ne rien valoir et de se retrouver exclu est si viscérale qu’elle nous fait adopter la stratégie de « séduction » où l’on peut se maintenir toute une vie dans le mensonge, caché derrière l’image que l’on projette de soi, bien à l’abri derrière nos masques. Sans trop s’en rendre compte, ce pattern nous fait entrer subtilement dans un mécanisme de déconnexion de soi : le déni, le refoulement, la fuite, la justification, la rationalisation, la défensive, etc. Tous les moyens sont bons pour ne pas se rencontrer en vérité. Ainsi, on arrive à ne plus être capable de voir la réalité telle qu’elle est, on la déforme à partir du faux moi défensif qu’on s’est construit. Ce faux moi nous sert à nous protéger de nos blessures d’amour et de valorisation. On se coupe de notre senti, pour éviter de contacter ce qui fait mal. On se coupe de la souffrance que l’on a enfoui très loin … au point de ne peut-être même plus s’en souvenir.

Le grand danger de cette coupure d’une partie de soi, c’est qu’à trop baigner dans la fuite et le faire-semblant, on en arrive à se mentir à soi-même. À s’être pris tellement au sérieux derrière nos fausses images et nos masques, que l’on finit par se croire en ne sachant plus qui est la personne qui est derrière cette façade. On vit coupé de soi. Coupé de la partie la plus vivante et vibrante de soi. Coupé de son âme. On est devenu un personnage.

Heureusement, la BONNE NOUVELLE c’est que peu importe jusqu’où on s’est enlisé dans le paraître et l’éloignement de notre authenticité, notre ÊTRE est toujours là, intègre, dans toute sa beauté et sa grandeur et ne demande qu’à être révélé. Pour retrouver la richesse de notre vérité intérieure, c’est une vaste opération de décapage qu’il faut entreprendre. Enlever les unes après les autres les couches superficielles et fausses pour retrouver notre ESSENCE SACRÉE. Pour renouer le contact amoureux avec l’intime de son ÊTRE. Oui, vivre dans la vérité, c’est un grand acte d’amour pour Soi. Un grand défi, à la hauteur de notre nature spirituelle.

Si notre égo se complait dans le mensonge, notre âme elle, appelle à la vérité. Une vérité intérieure profonde où il y a une cohérence totale entre ce que l’on dit, ce que l’on fait et ce que l’on pense. On redécouvre le plaisir d’être soi-même dans toute sa liberté et son unicité. On goûte le bonheur d’ÊTRE, juste à RESPIRER et à vivre DEBOUT dans sa DIGNITÉ.

Je laisse ma conclusion à une parole d’Évangile, encore bien pertinente en 2014. « LA VÉRITÉ VOUS RENDRA LIBRES »

Linda Léveillée

1. Voir Mentir de Christine Gagnon et Christian Martineau. Éditions Propulsion. 2011